Executive Life : Les copains et les coquins.




« Executive life, une affaire qui nous concerne » titrait à juste titre Le Parisien en une d’une de ses éditions de décembre. Oui cette affaire concerne tou(te)s les travailleur(se)s, tous les opprimé(e)s parce qu’elle met en évidence les liens compromettants du pouvoir politique avec le grand capital, parce que nous allons financer avec nos impôts une affaire de spéculation qui a mal tourné pour l’État français et un des gros bonnets du grand capital français, François Pinault.

770 millions de dollars, soit 626 millions d’euros ou encore 4,1 milliards de francs : telle est la facture - temporaire - de l’affaire Executive Life, cette compagnie d’assurances californienne que le Crédit Lyonnais, alors banque publique, a racheté, en toute illégalité, au début des années 90. Cette amende historique, fruit de longues négociations avec la justice américaine, permet à l’ensemble des personnes morales impliquées dans l’affaire Crédit Lyonnais/CDR (structure publique - donc l’État français - qui gère une partie des anciens actifs du Lyonnais), Artémis (holding de François Pinault) et Maaf Assurances - d’échapper à un procès pénal.

Aux termes de l’accord, l’État va verser 475 millions de dollars, le Lyonnais cent millions et la Maaf 10 millions. Quant à François Pinault, l’homme d’affaires et proche de Jacques Chirac, il a finalement accepté de verser 185 millions de dollars. Devant la menace d’un scandale politique majeur. Début décembre, les négociations entre les autorités françaises et américaines capotaient, suite au refus du milliardaire, propriétaire de la FNAC, du Printemps, de la Redoute, de Gucci, entre autres broutilles, de payer plus de 130 millions de dollars.

Une affaire d’État

Plutôt que de laisser M. Pinault se débrouiller, le gouvernement français - sur intervention directe de Jacques Chirac disent les mauvaises langues - refusait du coup de conclure un accord partiel avec les Américains. Pour ménager l’ami du président, les autorités françaises couraient ainsi le risque réel d’un procès pénal avec amendes plus élevées à la clé (qui auraient renchéri d’autant la note pour le contribuable). Le Crédit lyonnais - dont la perte de la licence bancaire américaine était dans ce cas plus que probable - risquait pour sa part un grand déballage à l’audience dont il aurait eu du mal à se remettre. Perspective qui serait loin de nous déplaire, si ses salarié(e)s ne devaient en être les premières victimes. Bref, Pinault, l’espace d’une semaine prenait tout le monde en otage, avant de caner, l’affaire Executive Life devenant une affaire d’État.

Les réticences à payer de Pinault, figure de la chiraquie, sont d’autant plus scandaleuses que de l’avis même de l’actuel président de sa holding Artémis - François-Henri qui n’est autre que son propre fils - il a réalisé 800 millions de dollars de plus-value sur le portefeuille d’obligations à haut risque de l’assureur californien qu’il a repris au Lyonnais en 1992 (cf. L’Expansion daté du 18 décembre). On appréciera.

En attendant le gouvernement Raffarin assure que l’embrouille Executive Life ne coûtera pas un sou au budget de l’État. On y croit tous. D’autant que le procès au civil, prévu en 2005, pourrait lui se conclure sur de nouvelles amendes.

Emma Klotz

 
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