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La Kanaky acclamée au meeting de solidarité à Paris




Faut-il voter ou boycotter le référendum du 4 novembre sur l’indépendance ? Mercredi à Paris, l’USTKE a expliqué son refus de participer à la mascarade arbitrée par un État français à la fois juge et partie.

Salle bien garnie, mercredi 19 septembre, dans la grande salle de la bourse du travail de Paris. Sur les bancs de bois lustrés par des générations de syndiqué.es, sous les blasons corporatifs des paveurs, boulangers, fondeurs, tailleurs, tabletiers et autres vieux métiers, environ 150 personnes étaient venues écouter les représentants de l’Union syndicale des travailleurs kanak et des exploités (USTKE) et de son allié politique, le Parti travailliste (PT).

Le grand absent de la soirée était le FLNKS qui, malgré l’invitation qui lui avait été faite, n’a pas souhaité s’associer à la soirée.

Ce n’est pas un secret : les relations sont très tendues entre le FLNKS et l’USKTE à l’approche du référendum du 4 novembre 2018 sur l’indépendance de la Kanaky-Nouvelle-Calédonie.

Le FLNKS s’est en effet engagé en 1998, avec les accords de Nouméa, à participer à ce référendum. Il appelle donc à voter oui à l’indépendance… sans illusion aucune sur les chances de l’emporter, le peuple kanak étant désormais minoritaire face aux colons [1].

L’USTKE et le PT, de leur côté, ne sont pas liés par les accords de Nouméa, qu’ils qualifient de duperie, et appellent en conséquence au boycott du référendum. Le FLNKS le déplore, estimant que cette division du mouvement indépendantiste va aggraver la défaite annoncée dans les urnes.

Rock Haocas, du PT, a expliqué tout cela, avant qu’André Forest, président de l’USTKE, ne brosse un tableau très sombre de la situation sociale du pays. Le peuple kanak y est toujours aussi marginalisé. A titre d’exemple, 3 % seulement des Kanak sont diplômé.es de l’enseignement supérieur (contre 25 % des Caldoches) ; ils représentent en revanche 80 % des détenus en prison, alors qu’ils et elles pèsent pour 40 % de la population du Caillou.

Paroles comoriennes, sahraouies, panafricaines...

Saïd Bouamama, du Front uni des immigrations et des quartiers populaires (FUIQP) a expliqué les enjeux impérialistes de l’État français dans l’océan Pacifique – grâce à ses colonies insulaires, la France est le « deuxième géant maritime mondial » comme aime à le rappeler Mélenchon-la-cocarde.

Ont également pris la parole l’association Solidarité Kanaky (qui a expliqué les grandes manœuvres autour de l’extraction du nickel), l’association Survie qui a rappelé que l’indépendance politique ne signifie pas forcément la fin de la tutelle (la Françafrique en atteste), le front Polisario (qui lutte au Sahara occidental contre le colonialisme marocain), la Ligue panafricaine Umoja (« unité » en swahili) et le Collectif de défense de l’intégrité et de la souveraineté des Comores, qui réclame la décolonisation de Mayotte et son rattachement à l’archipel.

Christian Mahieux, pour Solidaires et le Réseau syndical international de solidarité et de lutte (RSISL), a rappelé l’attachement historique d’une partie du syndicalisme français à la lutte anticolonialiste – Indochine et Algérie jadis ; Palestine ou Kanaky aujourd’hui.

De g. à dr., le délégué de la Ligue panafricaine Umoja, celle de Survie, André Forest (USTKE) et Rock Haocas (PT).

Signalons aussi le bref hommage rendu à notre camarade Gisèle Felhendler, inhumée mardi à Pantin. Militante d’Alternative libertaire et de Sortir du colonialisme, elle avait été la cheville ouvrière, pendant des années, de la Semaine anticoloniale et du Salon anticolonial de Paris. Nous reparlerons d’elle prochainement.

Dans l’assistance, on reconnaissait, entre autres, des militantes et des militants d’AL, de la CNT, du NPA, du FUIQP, d’Ensemble, de Solidaires, du PIR et du Mouvement des jeunes Kanak de France.

En conclusion, Said Bouamama a insisté sur le fait que les organisations amies n’avaient pas à s’immiscer dans les divisions internes au mouvement indépendantiste, et a témoigné de sa conviction que dès le 5 novembre, au lendemain du référendum, les indépendantistes sauraient de nouveau se serrer les coudes face au colonisateur. « Vive la Kanaky libre ! » a clamé André Forest sous les applaudissements, avant d’inviter un artiste ami à la tribune. La soirée s’est achevé par quelques vers de poésie.

Guillaume Davranche (AL Montreuil)

[1Lire à ce sujet « Kanaky : Référendum d’autodétermination, une chance ou un piège ? », Alternative libertaire de juin 2018

 
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