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Palestine : Contre l’apartheid, ripostons, boycottons !




L’offensive israélienne à Gaza et le soutien de la France à cette opération ont déclenché une forte contestation dans la rue, preuve que le mouvement de solidarité avec la ­Palestine existe encore. A confirmer sur le long terme, avec notamment le renforcement de la campagne Boycott-Désinvestissement-Sanctions (BDS) pour affaiblir l’État israélien.

Les manifestations contre les bombardements israéliens sur Gaza ont marqué l’actualité estivale. Comme en 2009, la rue s’est exprimée et les populations des quartiers populaires y ont été fortement présentes. Après l’interdiction scandaleuse au mois de mars dernier de la Marche anticoloniale, Manuel Valls a récidivé en interdisant plusieurs manifestations à Paris, maintenues par les organisateurs.

Des révoltes contre les forces de police ont eu lieu, notamment lors du rassemblement du 19 juillet à Barbès (auquel des militants d’Alternative libertaire ont participé, en parallèle de la manifestation sauvage ayant gagné le Sacré-Cœur puis les Halles). Le gouvernement a voulu empêcher la manifestation ? Il y en a eu plusieurs [1].

Interdictions sans précédent, elles ont constitué de véritables échecs politiques pour le PS, qu’il a tenté de masquer par une surenchère sur de marginales dérives « antisémites ». Le soutien à Israël : une politique impérialiste Pour démentir ces accusations, un rappel important qui contrecarre par la même occasion une thèse de l’antisémite Alain Soral : ce n’est pas le sionisme qui a engendré l’impérialisme mais l’impérialisme occidental qui a engendré le sionisme ; ce n’est pas le Conseil représentatif des institutions ­juives de France (Crif) qui est tout puissant ou qui dicte la politique de l’Etat, mais c’est bien l’Etat qui a intérêt à donner audience et autorité morale au Crif.

Le duo Valls/Hollande est sioniste sans complexe, mais cet alignement idéologique n’est que le reflet d’une tactique géostratégique historique : la domination du monde occidental sur le Moyen-Orient depuis les accords Sykes-Picot datant du 16 mai 1916, suivi en 1917 de la « proclamation Balfour » pour la création d’un « foyer national juif » en Palestine.

L’Etat d’Israël est une entité militarisée, équipée de têtes nucléaires et en permanence sur le pied de guerre, une place forte avancée de l’Occident à proximité de ces enjeux économico-stratégiques que sont le canal de Suez et les ressources énergétiques en pétrole et gaz qui abreuvent l’Occident depuis soixante ans. Ce n’est donc pas un conflit étranger qui s’importe en France comme les réactionnaires divers l’affirment, mais bien le peuple palestinien qui paye pour notre mode de vie, nos besoins économiques et nos alliances géostratégiques.

Des constructions idéologiques à combattre

Rappeler ces paramètres impérialistes est important pour comprendre ce soutien indéfectible à Israël et les importantes constructions idéologiques de légitimation (soutenir la « seule démocratie du Moyen-Orient »).

L’accusation d’antisémitisme permet, elle, de délégitimer toute critique d’Israël ; le risque pour les partisans du sionisme serait que la rue impose un changement de cap à la politique d’alignement actuelle. Toutefois, ces argumentations fonctionnent de moins en moins. Quant aux reproches faits au progressistes d’attribuer trop d’importance à ce conflit (comparaisons avec des conflits plus meurtriers), Alain Gresh a très bien répondu à ces arguments (rappelant l’exemple des mouvements d’opposition à la guerre du Vietnam et à l’apartheid en Afrique du Sud) : ce n’est pas par la tenue d’une comptabilité macabre que les peuples se solidarisent, mais parce qu’un conflit peut à un certain moment exprimer la « vérité d’une époque » [2].

Et en effet jusqu’en Amérique latine, la lutte du peuple palestinien, le blocus et le mur sont devenus des miroirs grossissants des rapports Nord-Sud, l’expression de la survivance de l’ancien ordre colonial et l’emblème de la domination néocoloniale actuelle. Mais surtout un symbole de résistance !

De même, le traitement des Palestiniens et les mots qu’on utilise pour parler d’eux font écho aux traitements et aux argumentations à l’encontre des populations racisées de France : ­contrôle sécuritaire et violences policières impunies, ségrégation urbaine, discriminations, stigmatisations islamophobes (le discours sur la menace musulmane culturelle et sécuritaire étant le même un peu partout en Occident et notamment en Israël). C’est du côté de ces déterminants sociaux que se trouvent les raisons du large soutien des populations issues de la colonisation à la Palestine, bien avant les déterminants identitaires ou religieux.

La répression des manifestations a bien été le révélateur de l’ordre raciste : punition collective au sein du quartier Barbès, arrestation au faciès et condamnation en première instance du jeune ­Mohamed S., interdictions d’exception adressées aux organisateurs. La gauche radicale fut aussi visée à travers notamment la mise en examen d’Alain Pojolat, militant du NPA, pour avoir appelé à la manifestation interdite.

Renforcer la Campagne BDS

Les rapports d’oppression ici ne sont donc jamais déconnectés de notre politique impérialiste. Il s’agit désormais, dans l’élan des mobilisations de cet été, de donner des moyens d’agir ici sur la durée en solidarité avec la Palestine. La campagne internationale de ­Boycott Désinvestissement Sanctions (BDS [3], dont Alternative libertaire est membre) est encore le meilleur moyen de pression pour combattre la politique israélienne et la seule solution face à l’isolement que connaissent actuellement les Palestiniens.

Ce n’est pas pour rien si Nétanyahou l’a qualifiée de principale menace actuelle pour Israël. La campagne BDS, par ses actions, pointe les complicités des institutions et des capitalistes avec Israël et notamment les compromissions avec la colonisation des territoires occupés (entre autres les entreprises Veolia, Sodastream, Mehadrin…).

Active dans la mobilisation, la campagne BDS l’a été toute l’année à travers des meetings, des rassemblements et des actions publiques de sensibilisation, par exemple des rassemblements réguliers devant les boutiques Orange (la société est visée pour son partenariat avec l’entreprise israélienne Partner ­Communications qui assure avec son réseau le service des colonies et de Tsahal). La campagne a déjà remporté des victoires comme contre l’entreprise Agrexco en 2012. Elle représente aujourd’hui le meilleur appui du combat pour la Palestine en France et dans le monde, et doit être renforcée, notamment dans les quartiers populaires et dans les entreprises.

Nicolas Pasadena (AL Montreuil)

[1Voir communiqué AL  : « Les flics du PS n’ont pas réussi a museler la rue » du 20 juillet 2014

[2Alain Gresh , De quoi la Palestine est-elle le nom ?, Les Liens qui libèrent, 2010

 
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