Rigueur en Europe : Slovénie an 01




La Slovénie a longtemps été le bon élève du libéralisme. Elle en retire aujourd’hui une croissance négative de 2,3 % et de sévères politiques d’austérité. Profondément corrompue, sa classe politique est la principale cible des révoltes qui secouent le pays depuis décembre.

Même motif, même punition : un pays qui satisfait aux exigences ultra-libérales, une classe politique aux ordres des marchés, et une structure économique fragile font de la Slovénie une victime de plus de la longue série des pays austéritaires. Fait nouveau, des manifestations massives ont secoué le pays et donné aux Slovènes un premier goût de la contestation radicale.

Tout commence mi-novembre, lorsque l’exaspération contre la corruption du maire de Maribor (deuxième ville du pays) atteint son comble et met les habitants dans la rue aux cris de gotof je (il est fini) ! La contestation gagne tout le pays : en trois semaines ce sont quelques 70 000 personnes qui, dans 18 villes, dénoncent des lendemains libéraux qui déchantent : chômage, insécurité, droits bafoués, service public dégradé et privatisé, avenir bouché.

Spontanéité et créativité

Les premiers étonnés sont les Slovène eux-mêmes. Dans les mots de la Fédération des organisations anarchistes (FAO) slovènes : « Le mouvement est décentralisé, anti-autoritaire et non-hiérarchique. Des gens qui n’avaient jamais mis les pieds dans la rue y participent, jusque dans les villages... […] Nous ne savons pas combien de temps nous pourrons tenir dans la rue. Mais ce qui est sûr, c’est que les gens font l’expérience du processus d’émancipation et ont gagné une parole qui leur avait été arrachée par la violence dans le passé. Personne ne pourra la leur reprendre. »

Créativité, solidarité, et spontanéité animent ces mouvements où aucun leader charismatique ne sort pour l’instant du lot, pour récupérer le mouvement.

En revanche, une certaine naïveté règne chez une partie des manifestants de décembre, qui critiquent les « émeutiers », appellent à la collaboration avec la police, sans aucune perspective structurante. C’est contre ce risque que la FAO veut sensibiliser la population. Son communiqué [1], à la fois explicite et encourageant, explique les mécanismes brutaux du capitalisme, tout en décrivant les avancées accomplies par la force de l’indignation. « Si nous voulons que la révolte se transforme en un mouvement social, sur la base de demandes, objectifs et visions concrets, il nous faut les articuler à ceux qui existent déjà dans le mouvement et parvenir à une forme d’organisation qui rende possible ce processus. »

Décentralisation, démocratie directe, outrepasser les partis politiques, et autogestion sont bien sûr les bases sur lesquelles le mouvement pourra perdurer. Et il y a bon espoir qu’il ne s’éteigne pas. Le socialiste Bohut Pahor élu en décembre (67 % des suffrages) va devenir président, alors que l’actuel Premier ministre (centre droit) est accusé de corruption et parle de démission. La rue avait raison, et gageons que l’année 2013 sera chaude en Slovénie !

Cuervo (AL Banlieue Nord-Ouest)

[1Disponible sur www.anarkismo.net

 
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