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Saint-Denis : « Femmes bienvenues », un label malvenu




À l’occasion du 8 mars dernier l’association « Observatoire de la laïcité » de Saint-Denis et le collectif « Sacamain » ont distribué un autocollant « Femmes bienvenues » à coller sur la vitrine de certains cafés de la ville dans le cadre d’une campagne pour la mixité. Ecran de fumée ?

En décembre dernier France 2 avait diffusé un reportage sur un PMU de Sevran censé montrer que les femmes sont effacées dans l’espace public dans ces « quartiers populaires » de « banlieue » où la « mentalité est différente » à cause de « la tradition, la culture, mais aussi la religion ». Une contre-enquête du Bondy Blog a prouvé que cet établissement avait aussi des clientes. Ce reportage est porteur de stigmatisations racistes et classistes de certains quartiers dont les habitants et habitantes seraient particulièrement sexistes.

Inquiétante récupération

L’initiative des deux associations s’inscrit directement dans cette lignée et ne semble inspirée par aucun principe de laïcité ou de féminisme. Des habitantes et habitants de Saint-Denis ont d’ailleurs publié un texte demandant aux cafetiers de ne pas arborer ce « label », tout comme les associations Place aux femmes d’Aubervilliersqui dénonce « l’inquiétante récupération de la lutte des femmes pour l’égalité et la mixité », et Femmes solidaires de Saint-Denis, regrettant la stigmatisation de la population de la ville et expliquant pourquoi ce n’est pas un outil de libération et d’égalité pour les femmes.

En effet, l’entreprise d’exclusion des femmes de l’espace public n’est pas propre à la Seine-Saint-Denis. Les PMU des zones rurales ou les locaux de l’Assemblée nationale sont aussi moins fréquentés par les femmes.

Les lois sur la parité en politique ont permis la féminisation des bancs du Parlement. Pour autant les femmes y sont-elles bienvenues ? Les députés qui ont sifflé Cécile Duflot et sa robe à fleurs n’ont jamais été inquiétés pour leur attitude d’un sexisme crasse. On sait depuis mars dernier que Denis Baupin, accusé par ses collègues d’agressions et de harcèlement sexuel ne sera pas poursuivi car les faits sont considérés comme prescrits par la justice. Il faut croire que les « représentants » de la République peuvent cumuler leur mandat avec celui de sbire du patriarcat sans problème.

Le système patriarcal qui assujettit et opprime les femmes fonctionne, notamment en distillant la peur, en les isolant dans la sphère privée où elles subissent l’exploitation domestique. En moyenne, les femmes consacrent presque deux fois plus de temps que les hommes aux tâches ménagères puisqu’elles y sont employées pendant 3 h 30 par jour contre 2 h pour les hommes.

Education antisexiste

Les femmes n’ont pas besoin d’arguments stigmatisant les quartiers de la relégation socio-spatiale pour se sentir les bienvenues dans l’espace public. Elles ont besoin de la destruction du patriarcat. Il faut que les agressions sexistes et sexuelles soient systématiquement proscrites, notamment par une éducation antisexiste des garçons et des hommes. Elles ont besoin de grandir et d’être éduquées en se sentant libre d’évoluer dans l’espace public. Or le documentaire Espace de Eléonor Gilbert montre bien comment les cours d’école préfigurent les bars de Sevran et des zones rurales, ou encore l’Assemblée. À la récré, les filles sont reléguées aux marges pendant que les garçons occupent tout l’espace commun sans que la plupart des enfants et encore moins les adultes en soient révolté.es.

Lucie et Émilie (AL Saint-Denis)

 
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