Classique de la subversion : Jacques Perdu, « La révolte des canuts »




Édité pour la première fois en 1931, ce texte de Jacques Perdu revient sur les insurrections des canuts lyonnais en 1831 et 1834, qui marquent la naissance du mouvement ouvrier français.

L’ouvrage, bien documenté, se base principalement sur des témoignages de l’époque, mais aussi sur des articles de journaux parus peu après les émeutes. L’auteur présente tout d’abord le contexte politique et social ainsi que les conditions de vie des ouvriers et des ouvrières des fabriques.

Un an après la révolution de 1830 et l’arrivée au pouvoir de Louis-Philippe, l’industrie de la soie est en crise. Les salaires ouvriers sont misérables. Les relations entre les canuts (ouvriers tisseurs), les maitres d’atelier, les commis, les fabricants et les patrons sont étudiées.

C’est suite à l’annulation d’un salaire minimum par les fabricants que plus de 30 000 tisseurs se révoltent spontanément à Lyon, en novembre 1831. Les insurgés prennent les armes, sympathisant parfois avec la garde nationale. Après deux jours de combats, la ville est sous le contrôle des travailleurs. Mais ces derniers ne savent que faire de leur victoire, si bien qu’ils abandonnent la bataille et acceptent de reprendre le travail après de vagues promesses, qui ne seront d’ailleurs pas tenues.

Les ouvriers, comprenant alors que ce régime leur est profondément hostile, s’organisent en associations et en coalitions, qui par leur fonctionnement, préfigurent le syndicalisme .

Face à l’apparition d’une certaine conscience de classe chez les prolétaires et à la multiplication des grèves en 1833, le gouvernement projette d’interdire ces associations.

C’est à l’occasion de procès d’ouvriers mutuellistes qu’en avril 1834 se déclenche
la seconde insurrection. Beaucoup moins massive, elle regroupe des canuts, des travailleurs d’autres corporations mais aussi des républicains et s’attaque directement au régime de Louis-Philippe. L’isolement des insurgés les condamne à l’échec, d’autant plus que la bourgeoisie a retenu les leçons de 1831 et organise une répression aveugle et sanglante.

Il faudra donc attendre 1871 et la Commune de Paris pour que le mouvement prolétarien pose les bases d’un nouveau pouvoir politique, d’une société socialiste...

Ce livre, simple d’accès, bien documenté, nous offre la possibilité d’en apprendre plus sur ces premières insurrections du prolétariat français. Par l’étude de la prise de conscience progressive des travailleurs entre 1831 et 1834, l’auteur explique aussi l’origine de certaines pratiques de la lutte des classes, comme le syndicalisme par exemple, permettant ainsi de mieux le comprendre dans une période ou il traverse une crise importante.

Julien S. (AL Montpellier)

  • Jacques Perdu,
    La révolte des canuts. Les insurrections lyonnaises 1831-1834, Les Amis de Spartacus, 2010, 89 p., 9 euros.
 
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