Collectivités territoriales : Une réforme... pour que rien ne change




Pendant les mobilisations sociales, le gouvernement continue ses prétendues « réformes » sur plusieurs fronts… notamment celui des collectivités territoriales. Présentée comme un grand chambardement, cette réforme fait pourtant le jeu habituel des élus locaux…

Si les motifs affichés de cette nouvelle loi sont de « clarifier » et « simplifier » le système des collectivités et leur empilement, il faut pourtant bien constater que la réforme accomplit de petits pas, sans bien sûr remettre en cause la situation existante.

Des enjeux avant tout électoraux

Du côté des départements et des régions, ils restent en l’état, à l’exception de leur personnel politique : les délégués territoriaux seront élus pour siéger dans les deux assemblées. Moitié moins d’élus donc, mais des élus plus « forts », nous dit-on, en clair cela va encore accentuer la forte sélection sociale de ces élus, déjà largement issus des classes supérieures… Du côté des intercommunalités, là encore, on est loin des grands changements affichés : ces structures qui gèrent de plus en plus de politiques locales vont maintenant avoir leurs délégués désignés lors des élections municipales. Plus de « démocratie » locale, nous dit-on, mais là encore, on continue dans le cumul des mandats municipaux et intercommunaux, renforçant la sursélection sociale des professionnels de la politique qui bénéficient largement de rentes de position et dont les profils sociaux s’éloignent toujours plus de celles et ceux qu’ils sont censés représenter !
Ce qui occupe donc le gouvernement, ce sont surtout les mécanismes électoraux, alors même que les taux de participation aux élections, même locales, demeurent faibles, démontrant la distance sociale qui sépare les habitantes et habitants, notamment des classes populaires, des élites politiques locales.

Petits arrangements avec les élus locaux

À ce petit jeu, les élus locaux ne se sont jamais opposés franchement aux transferts de compétence de l’État, comme la décentralisation Raffarin de 2003, même si ces transferts font peser de nouvelles charges financières aux collectivités. Parce que les associations d’élus locaux, qui montrent une large entente entre les différents partis dits de gauche comme de droite, pensent toujours tirer leur épingle du jeu avec de nouveaux secteurs de politiques locales à mener, de nouveaux emplois locaux à contrôler. De l’autre côté, le gouvernement ménage les « grands » élus, ceux qui sont solidement implantés et gèrent les plus gros budgets, dans les territoires « attractifs » et « compétitifs », qui disposent des richesses liées aux activités économiques « prestigieuses », et bénéficient de fortes dotations de l’État. C’est ainsi qu’à l’inverse se joue le retrait des services publics dans les zones rurales, rendant la vie difficile à nombre d’habitantes et d’habitants…

Réappropriation !

Il y a urgence à se saisir de la question des services publics locaux, sans en laisser la gestion aux seuls élus. L’expérience montre ainsi que sans pression des habitants, on n’obtient rien. C’est le cas en Seine-Saint-Denis, où au sein de la communauté de communes Est-ensemble, dans laquelle les « élus des élus » (les délégués intercommunaux) tardent à renoncer à déposséder Véolia du juteux marché de distribution de l’eau, même s’ils se tâtent du fait de la mobilisation grandissante contre ce racket organisé des habitants.

Un chantier d’ampleur devrait concerner la réappropriation des savoirs techniques en matière de transport, logement, environnement, etc. par les habitantes et habitants, pour mettre à mal l’accaparement du pouvoir de décision par une élite politique et technicienne qui gère en fonction des intérêts bien compris des catégories sociales les plus favorisées… Car on ne souhaite pas « participer » aux débats et autres consultations mises en place par des élus en quête de légitimité populaire, mais bien se réapproprier nos conditions de vie et décider, collectivement et démocratiquement, sans délégation de pouvoir et chèque en blanc, mais avec des mandats révocables dans le temps, des services que l’on construira socialement pour toutes et tous.

V. B. (AL 93)

 
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