Constitution européenne : Alternative libertaire dit non !




Le texte ci-dessous est adapté d’une motion adoptée par la coordination nationale d’Alternative libertaire où figurent analyses et positions sur le projet de constitution européenne. L’analyse a été élaborée avant l’échec de la Conférence intergouvernementale du 15 décembre.

Le projet de constitution européenne a été présenté en juin 2003 au Conseil européen de Salonique par la « commission Giscard ». Lors de la Conférence intergouvernementale (CIG) de Bruxelles le 15 décembre, les 25 gouvernements de la future UE n’ont pu parvenir à un consensus sur la Constitution. De nouvelles négociations seront donc engagées sous la présidence irlandaise après le 1er mai 2004. Si aucun consensus n’est trouvé, le fonctionnement de l’UE sera régi par le traité de Nice de 2000, que tous les technocrates jugent impraticable. Si un consensus entre les gouvernements est trouvé, il devra ensuite être validé dans chaque État de l’Union entre le 13 juin (élections au Parlement européen dans 25 pays) et le 31 décembre 2004.

Mais ce qui divise les États de l’UE, ce n’est pas une opposition de fond sur le contenu politique et social de la Constitution, c’est une querelle sur la répartition des pouvoirs. Tout le contenu libéral de la Constitution restera ce qu’il est quelle que soit l’issue du différend actuel.

La Constitution européenne : l’intergouvernementalisme + la technocratie

Sur le plan institutionnel, la Constitution présentée par la commission Giscard précise simplement les règles d’un fonctionnement intergouvernemental déjà existant, l’appareil politique de l’Union européenne reposera comme auparavant sur la technocratie installée à Bruxelles. En revanche elle grave dans le marbre quelques principes fondamentaux qui se rapportent presque tous au caractère inviolable de la loi du marché. Jusque là, rien de nouveau par rapport aux traités de Maastricht (1992), Amsterdam (1999) ou Nice (2000).

L’adoration du marché, dieu-soleil de l’Union européenne

La façon dont le projet Giscard confère un caractère constitutionnel à des mécanismes de contrôle de la concurrence confine à l’absurde et en dit long sur la nature de la « construction européenne ». Derrière ce terme, les bourgeoisies des différents États cherchent à établir le code du commerce qui garantira au mieux leur enrichissement dans l’équilibre de leurs intérêts respectifs. Les travailleurs et travailleuses de chaque pays de l’Union sont les perdant(e)s de cette « construction européenne », déclinaison continentale de la mondialisation capitaliste.

Dans sa rédaction, le projet Giscard de constitution européenne utilise à fond la méthode du faux-semblant, qui consiste à proclamer de grands principes humanistes pour, dans le détail des articles, codifier tout le contraire. Ainsi on apprend dans l’article I-2 que « l’Union se fonde sur les valeurs indivisibles et universelles de dignité humaine, de liberté, d’égalité et de solidarité ». Mais cette belle déclaration est contredite dans les articles III-69, 70, 77, 144 et 180 qui répètent à l’identique que l’Union agit « conformément au respect du principe d’une économie de marché ouverte où la concurrence est libre ».

Des garde-fous contre toute tentation sociale

Les différents gouvernements n’ont pas fini, pour mener leur politique antisociale, de se cacher derrière les contraintes de l’UE. Un trait fondamental du projet de constitution est ainsi d’inscrire comme obligatoire tout un arsenal de dispositifs libéraux (y compris certains qui répondent spécifiquement aux revendications de certains lobbies patronaux), mais de requérir l’unanimité des membres pour toute mesure risquant de contrecarrer les intérêts capitalistes. Il en est ainsi des mesures contre la fraude fiscale, ou en matière d’impôt sur les sociétés. Il en est de même pour le contrôle de la circulation des capitaux, traité dans l’article III-46-3 : « Seule une loi ou une loi-cadre européenne du Conseil des ministres peut établir des mesures qui constituent un pas en arrière dans le droit de l’Union en ce qui concerne la libéralisation des mouvements des capitaux à destination ou en provenance de pays tiers ».

Pour le reste, presque tout ce que peut souhaiter l’Union des confédérations de l’industrie et des employeurs d’Europe (Unice, une union patronale dont, en France, le Medef est membre) est inscrit dans la partie III du texte.

L’Union européenne, instrument de l’exploitation économique

La position de l’UE concernant le commerce international (et donc encadrant ses négociateurs à l’OMC) est inscrite dans la Constitution. L’UE « entend contribuer [...] à la suppression progressive des restrictions aux échanges internationaux et aux investissements étrangers directs, et à la réduction des barrières douanières et autres. » (III-216).

En matière de casse des services publics, il est prévu que si la politique d’un État en faveur d’un service public a « pour effet de fausser la concurrence dans le marché intérieur, la Commission examine avec lui leur adaptation aux règles établies par la Constitution. Par dérogation à la procédure de droit commun, la Commission ou tout État membre peut saisir directement la Cour de justice qui statue à huis clos. » (III-17).

Notre objectif : enclencher une crise de l’Union européenne

La crise de légitimité de l’Union européenne est latente depuis les débuts. Elle a été renforcée par la signature du traité de Maastricht et, dans certains pays, par le forcing des classes dirigeantes en faveur de l’UE, malgré l’hostilité majoritaire de la population. Ainsi l’État danois a-t-il réorganisé le référendum sur la ratification du traité de Maastricht jusqu’à ce qu’il obtienne une petite majorité favorable à la signature. Ainsi l’État irlandais, confronté au « non » de la population au traité de Nice en juin 2001, a-t-il dû réorganiser le référendum pour obtenir une majorité favorable à la signature en octobre 2002.

L’éventualité d’un référendum sur la Constitution européenne - et d’un « non » majoritaire dans plusieurs pays - peut être l’occasion de déclencher une crise majeure dans l’UE.

 Alternative libertaire s’oppose à l’adoption de la Constitution européenne proposée par la commission Giscard, socle d’une démolition sociale dans chaque État de l’UE ;
 Alternative libertaire est favorable à la tenue d’un référendum dans chaque État de l’UE sur le projet de constitution européenne. Il est essentiel de participer à un arc de forces politiques et sociales pour mettre la question d’un référendum sur la place publique et exiger sa tenue ;
 en cas de référendum, Alternative libertaire fera campagne pour un « Non anticapitaliste et internationaliste ».

 
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