Débat : L’islamophobie est bien une forme de racisme




Le racisme qui frappe spécifiquement les musulmanes et les musulmans a un nom : l’islamophobie. Il faut le combattre au nom de la liberté d’opinion et du droit des minorités à vivre dignement.

Loi sur la burqa, référendum suisse, saccage de la mosquée de Castres, débat nauséabond sur l’identité nationale… les attaques islamophobes ont été légion ces derniers mois. « Islamophobes » c’est-à-dire, notamment depuis le 11 septembre 2001, les attaques contre une minorité religieuse – les musulmanes et les musulmans – qu’il semble autorisé aujourd’hui de soupçonner et montrer du doigt en permanence.

Le vote suisse contre les minarets démontre bien que ce rejet de l’islam est fondamentalement xénophobe et identitaire, tandis que la burqa dérange moins pour son aspect patriarcal que parce qu’elle elle est portée sur le territoire français. Les musulmans sont toujours perçus comme extrémistes. Par exemple, le terme même d’« islam modéré » est opposé à un islam qui serait par nature fondamentaliste. Parle-t-on de catholicisme, de protestantisme ou de judaïsme modéré ? Non ! Tout semble bon pour assimiler les musulmans à une nébuleuse criminogène : peur du terrorisme, peur des jeunes, peur de l’immigration, et même peur du « verlan » et des « casquettes à l’envers » dans le cas de Nadine Morano [1] amalgamant musulmans, immigrés et jeunes de banlieues.

C’est pourtant un fait incontestable : 4 millions de Françaises et de Français ont un dieu qui s’appelle Allah, font le ramadan, et parmi eux 400 000 environ vont à la mosquée et mangent hallal. Les nostalgiques de la « France éternelle » ne peuvent admettre ce fait social. Mais comme une partie du « peuple de gauche » n’arrive pas non plus à le digérer, on peut dire que l’islamophobie est aujourd’hui le meilleur cheval de Troie de la réaction dans ce pays.

Gênée aux entournures

Et l’extrême gauche ? La dénonciation de l’islamophobie lui pose problème. Elle est terrorisée à l’idée d’être taxée d’« islamo-gauchisme », et gênée aux entournures par cette implacable réalité : dans certains cas, s’opposer à l’oppression d’une minorité, cela peut être synonyme de défense de la liberté religieuse… et de la construction de temples (avec minarets) !

Le projet communiste libertaire n’est pas de décréter comment il faut vivre, se comporter, ce qu’il faut penser et croire ou non. Aussi, si les libertaires combattent la prétention des états-majors religieux à dicter leur loi et l’ordre morale à la société, il n’est pas question de limiter la liberté individuelle de culte. Beaucoup de militantes et de militants athées doivent être au clair avec cela s’ils veulent pouvoir se solidariser avec les musulmans, sans avoir l’impression d’être pris dans une contradiction éthique. Il y a quelques préjugés à surmonter pour défendre le vivre-ensemble et s’engager pleinement auprès des victimes de l’islamophobie sans être obligé de rappeler à chaque fois notre combat contre l’aliénation religieuse comme s’il fallait se justifier.

Nico P. (AL 77)

[1À Charmes (Vosges), le 14 décembre 2009.

 
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