Présidentielle : Fillon, le rebelle de sable




L’ancien Premier ministre et probable futur Président se voit lui aussi comme un rebelle en lutte contre le « système ». Mais la révolution qu’il propose et avant tout libérale, conservatrice et hostile aux classes populaires. Décryptage.

François Fillon représentera Les Républicains et autres groupuscules de droite à l’élection présidentielle. Et c’est juré, lui aussi est antisystème, comme l’a déclaré sur Franceinfo ­Bruno Retailleau, sénateur LR et soutien du candidat. Pour qualifier Fillon d’« antisystème », « qui veut secouer le cocotier », il faut certes avoir une bonne dose d’humour, quand on sait que l’ancien Premier ministre est élu depuis qu’il a 27 ans… Et pourtant, il suffit de regarder le programme du candidat à la primaire pour voir à quel point il est, en effet, antisystème et même contre tous les systèmes : le système de santé, le système de retraite, le système scolaire…

D’abord, le candidat à la primaire a fait valoir un programme promettant de mettre à bas le système de santé, même s’il a légèrement rétropédalé une fois désigné candidat. Fillon propose en effet de privatiser très largement la Sécurité sociale, en transférant une large partie de la couverture vers l’assurance privée. Au système solidaire ne reviendrait que la charge de garantir les soins d’affection de longue durée ou graves (cancers…), qui génèrent peu de bénéfices, tandis que les soins les plus solvables seraient offerts en pâture aux amis assureurs du Président (Henri de Castries, potentiel futur ministre de l’Économie, est aussi l’ancien PDG d’Axa). Par ailleurs, l’hôpital, déjà en sous-effectif, est promis à des suppressions de postes. On voit mal comment le service public de la santé pourra offrir des soins dignes de ce nom dans de telles conditions. Les salarié.es modestes devront donc payer bien plus cher pour avoir des soins de moindre qualité.

Du côté de l’école, outre les suppressions de postes qui la toucheront également, Fillon a promis de favoriser davantage l’enseignement privé (chrétien, mais pas musulman bien sûr…). Pour ne rien laisser au hasard, l’homme a déjà plein d’idées pour réformer les programmes, qui seraient trop idéologiques, trop formatés par le « pédagogisme » ambiant. Il entend les remplacer, en histoire par exemple, par une sorte d’éloge de la France éternelle, blanche et catholique (baptisé « récit national ») à mille lieues de ­toute scientificité.

Engraisser ses amis assureurs

Quant au système judiciaire, qu’on n’est certes pas obligé.e de beaucoup aimer, on risque bien de le détester encore un peu plus avec Fillon au pouvoir : le candidat veut supprimer la contrainte pénale comme alternative à la prison, « rétablir le caractère automatique des révocations de sursis » et « supprimer l’automaticité des réductions de peine ». Bref, il s’agit d’être toujours plus sévère avec les « délinquants » (mais pas les fraudeurs fiscaux, qui de toute façon n’auront plus grand-chose à frauder), et d’avoir davantage recours à la prison. La construction de 16 000 nouvelles places en cellule est en projet.

Le système de retraite par répartition, que le Premier ministre Fillon avait commencé à saccager en 2003, est promis à l’achèvement définitif : le candidat projette de passer l’âge de départ en retraite à 65 ans, de favoriser la retraite par points et la capitalisation, histoire d’engraisser encore un peu plus ses amis assureurs.

Bref, Fillon veut finir de défaire tout ce qui garantit encore vaguement une protection sociale aux classes populaires en France. Il s’agit bien de servir encore plus la soupe aux capitalistes au détriment des salarié.es. Rien de moderne, on avait déjà vu ça au Royaume-Uni et aux États-Unis dans les années 1980. Et rien que les travailleurs et travailleuses organisé.es ne puissent mettre en échec par la force du collectif.

Vincent (AL Paris-Sud)

 
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