Lire : John Holloway, Crack Capitalism




Cet ouvrage de John Holloway est dans la continuité de son livre au titre évocateur Changer le monde sans prendre le pouvoir, paru en 2002. Dans le monde actuel, le meilleur moyen d’en finir avec le système capitaliste est de ne pas le reproduire, de mettre en place d’autres moyens de vivre, ce que l’auteur appelle « le faire ».

Après une analyse plus ou moins classique du système et de la dynamique globale du capitalisme comme moyen de domination sur la vie de chacun, accompagnée d’une remise en question de son bras droit, l’État, comme moyen de maintien de l’ordre, l’auteur s’attaque aux moyens traditionnels de lutte au sein de l’extrême gauche (marxisme, anarchisme, altermondialisme, autonomie). En effet, Holloway considère que tout les groupes militants, quelle que soit leur forme, de manière inconsciente, restent très souvent bloqués dans une vision du travail, de l’organisation sociale, de la révolution qui ne permet pas de renverser le système capitaliste. En effet, pour lui, c’est le capital qui fixe le temps des conflits et la révolution est vue comme un futur à préparer alors que de nombreuses expériences se créent au quotidien sans attendre « le grand soir ».

Pour l’auteur, il faut alors regarder et se servir de ce qui se fait en ce moment, quelle que soit la taille de l’expérience (de la création d’une Amap au mouvement zapatiste en passant par l’ouverture d’un squat ou d’une bibliothèque par exemple) pour construire des modes de vie différents. C’est ce qui est appelé « brèche » dans le livre. Ces brèches sont de formes multiples et sont des moments ou des lieux où il y a une volonté d’insubordination face au système, petite ou grande, individuelle ou collective, éphémère ou voulant s’inscrire dans la durée. Et pour Holloway, ce sera l’ensemble de ces brèches, aussi différentes soient-elles, qui seront peut-être un moyen de renverser le capitalisme.
On pourra reprocher à ce livre très théorique, bien qu’il cite de nombreux exemples, une certaine complexité à certains moments et donc une certaine difficulté à la lecture pour des personnes peu habituées aux grands débats sur le marxisme et ses courants.
C’est malgré tout un vrai pavé dans la mare des idées dominantes. Il nous permet de poser des questions sur nos propres pratiques quotidiennes et militantes. Il n’apporte pas de solutions, ni de certitudes par rapport à l’évolution du monde, ni de réponses toutes faites, mais nous donne une ouverture vers une infinité d’expériences qui servent au jour le jour à détruire le capitalisme.

Vince (AL Paris Nord-Est)

• John Holloway, Crack Capitalism, 33 thèses contre le capital, 2012, éditions Libertalia, 458 pages, 20 euros.

 
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