Lire : Mar, « Travailleurs, vos papiers ! »




Sous le pseudonyme collectif de Iana Mar, trois sociologues de Paris-X Nanterre (Claire Flécher, Ludo Simbille, Daniel Véron) mettent en commun leurs observations du mouvement des travailleurs sans-papiers débuté en 2008. Plus qu’une simple réappropriation du discours politique, leur ouvrage apporte un éclairage sociologique sur les lignes de force et de fracture de cette lutte pour l’émancipation.

Le livre s’ouvre et se clôt sur les avancées révolutionnaires d’une lutte emblématique : comment les clandestins sont devenus des « sujets politiques » à leurs propres yeux. Comment, en récusant la figure du clandestin (mouvement de Saint Bernard de 1996), puis du « simple » sans-papiers, les travailleuses et travailleurs sans papiers ont construit une représentation d’elles et d’eux-mêmes comme travailleurs salariés, migrants. Nombreux à être issus des anciennes colonies françaises, ils ont brisé au passage la contre-vérité du migrant envahisseur-profiteur, révélé la fraude instituionnalisée des « irréguliers » et montré comment se réactualise en France la domination coloniale, sur fond d’exploitation mondialisée des travailleurs des pays pauvres.

Et c’est à la faveur de cette lutte, dans cette « marge », par cette altérité que les travailleuses et travailleurs sans papiers ont pu réellement opérer un écart à soi, là où devient possible le sujet politique. Et ils n’ont pas eu besoin de recourir, comme le veut une certaine analyse, à la mobilisation de ressources (financières notamment) comme condition sine qua non pour se mobiliser.

Cette question touche d’ailleurs un autre point abordé par l’ouvrage, celui des pratiques de soutien par syndicats et associations et ce qu’elles peuvent engendrer comme formes de paternalisme, condescendance, parfois de rapports « néo-coloniaux ».
Mais c’est un autre sujet...

Fanny (AL 93)

 
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