Ni dieu ni maître d’école : Et notre école rationnelle amazonienne ?




Revenons à notre sujet initial. Nous avions un indice, deux mois plus tard où en sommes-nous de la recherche  ? Est-ce que ces terres éloignées de la Catalogne de Ferrer ont connu elles aussi l’éducation libertaire du martyr de Montjuich  ? Et si oui, comment cela a-t-il eu lieu  ? Un passage par la bibliothèque libertaire Maxwell Ferreira de Belém va nous donner quelques éléments supplémentaires. Cette bibliothèque, c’est un peu la malle aux trésors pour nous, anarchistes locaux, qu’on soit communiste libertaire, ou d’une autre sensibilité. Là, les affiches et drapeaux des mouvements anarchistes mondiaux – parmi lesquels Alternative libertaire figure en bonne place – malgré leur nombre n’arrivent pas à cacher la quantité de livres impressionnante, en portugais bien sûr, mais aussi en espagnol, en anglais et en français, disponibles dans ce lieu qui poursuit la tradition libertaire des athénées et autres lieux d’éducation populaire si chère à nos yeux.

Et ainsi, lors d’une visite, un camarade qui connaît ma recherche, se dirige vers les étagères et d’une main sûre sort de l’une d’entre elle un ouvrage  : O Anarquismo na escola, no teatro, na poesia [1] d’Edgar Rodrigues. Il me dit  : «  Regarde là-dedans, camarade, je crois que tu peux y trouver des choses qui t’intéresseront.  »

Ainsi, revenu à mes pénates, je feuillette le sommaire et jette mon dévolu sur le chapitre traitant des écoles rationnelles créées au Brésil, et là, la liste se déroule, longue, fournie  : Belém y figure, et en bonne place, bel et bien en 1919, soit deux ans après la grande grève générale lancée depuis le centre économique qu’est
São Paulo et qui permit des avancées sociales considérables. L’école rationnelle de Belém est là, presque sensible, présentée pour son inauguration par des figures proches du mouvement ouvrier local telles qu’un certain Bento de Menezes... ni plus ni moins que ce fameux Bruno de Menezes (sous son prénom d’état civil), le poète du Pará tant vanté par mes camarades libertaires férus de lettres amazoniennes.

Que nous dit exactement le texte d’Edgar Rodrigues  ? L’Enseignement Rationaliste est l’objet d’un chaleureux commentaire dans les pages de O Semeador [2] qui nous rend compte de l’inauguration de l’École Rationnelle Francisco Ferrer, à Belém – Pará, le 13 octobre 1919. Des représentants de la Fédérations des classes travailleuses, Union des chauffeurs, de la résistance des officiers barbiers, de la Fédération de la construction civile, du Syndicat des artistes tailleurs, de l’Union
des employés d’hôtels et restaurants, de l’Union des ouvriers cordonniers et du centre cosmopolite de bragance prirent la parole sous la présidence du «  camarade Silva Gama  ». «  Les camarades  » Júlio Clementes dos Santos, Antonio Porto, Bento de Menezes et Fernando Nazaré parlèrent en outre de l’importance de l’enseignement rationaliste «  maintenant implanté au Pará  ».

Prochaine étape, un autre lieu de recherches  : les archives publiques de l’État du Pará. Là, le but sera de retrouver les documents qui font état de la création de cette école, son emplacement d’origine, qui y fut professeur, pendant combien de temps elle a fonctionné et quelles réactions, positives ou de rejet, elle a suscitées. Beaucoup de choses à découvrir en somme.

Accattone

[1L’Anarchisme à l’école, au théâtre, dans la poésie.

[2Le Semeur.

 
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