Quel rôle des partis d’opposition dans le processus révolutionnaire ?




Tous les regards se tournent vers la Tunisie au moment où un nouveau gouvernement provisoire se met en place (le 3e depuis la chute de Ben Ali), vraisemblablement sous la pression d’une opposition renforcée par les revendications exprimées par la population : Béji Caïd Essebsi (nouveau premier ministre qui avait remplacé Mohamed Ghannouchi le 27 février) a procédé à un changement au sein de son gouvernement provisoire suite à la démission de cinq de ses ministres, dont deux de l’opposition. C’est aussi sous la pression populaire que le gouvernement a annoncé la dissolution de la police politique et de l’appareil de sécurité d’État hérités de Ben Ali, qui les avait favorisés tout en écartant l’armée. Ces deux organismes étaient devenus des symboles pour la population.

Acteurs et stratégies de l’opposition en Tunisie

Sans retracer intégralement le rôle joué par chaque organisation, rappelons que la situation actuelle est celle d’une transition démocratique avec pour enjeu explicite la quête d’une réelle légitimité pour les acteurs politiques qui vont former la future assemblée constituante :

La Haute Commission des réformes politiques, présidée par Yadh Ben Achour et qui regroupe désormais deux instances : le Conseil et la Commission des experts, va établir un système électoral spécial d’ici la fin du mois de mars, afin que l’élection d’une constituante ait lieu le 24 juillet. A cette haute commission participent d’ores et déjà des personnalités, de représentants des partis politiques et des organisations de la société civile « qui ont participé à la révolution ou l’ont soutenue », c’est-à-dire des membres du Conseil national de sauvegarde de la révolution (CNR), constitué d’une coalition large de 28 partis d’opposition, depuis Ennahdha (islamiste) jusqu’à l’extrême gauche en passant par l’UGTT.

Les principales forces d’opposition (UGTT et PCOT) se félicitent donc de la forme prise par la transition démocratique, encore que Hamma Hammami, chef du Parti communiste ouvrier tunisien (PCOT), émet des réserves notamment sur le délai « trop court de quatre mois et demi » selon lui pour l’élection de l’ANC.

Le CNR de même que le Front du 14 janvier s’attachent à représenter la volonté populaire, mais la vigilance est toutefois de mise puisque l’expression des comités populaires locaux, qui sont un maillon de base du mouvement, n’y ont pas de représentation formelle [1]

Les partis membres du Front du 14 janvier :
 Ligue de la gauche travailliste
 Mouvement des Unionistes nassériens
 Mouvement des nationalistes démocrates (Al-Watad)
 Courant baasiste
 Gauche indépendante
 Parti communiste des ouvriers de Tunisie (PCOT)
-Parti du travail patriotique et démocratique (PTPD)

La situation en Libye

Toute forme de parti y étant interdite, l’opposition est très faible et a de plus, lorsqu’elle existe, mené son action depuis l’étranger, sans grande influence sur la société. L’appel à la désobéissance civile (lancé par l’opposition [2] depuis l’Angleterre et les États-Unis et donc adressé majoritairement à des acteurs organisés) qui annonçait le mouvement pour le 17 février, a été devancé par l’insurrection de Benghazi.

Dans la société libyenne, les conditions sont réunies pour que se mette en œuvre un soulèvement auto-organisé : très pauvre dans les années 1950, la Libye est le pays le plus riche d’Afrique, et la population est éduquée. Le statut des femmes est enviable avec une égalité de jure et de fait et l’interdiction de la polygamie. En revanche la population est très jeune et touchée par le chômage à 30%, alors que justement la population est jeune et urbaine à plus de 80%.
La révolte en Libye exprime la rupture du "pacte du Livre vert" (le catéchisme kaddafiste) et de son mensonge de démocratie directe masquant la corruption du régime et des « comités révolutionnaires ».

Secrétariat international d’AL

[1Lire l’intervention de l’écrivain et intellectuel Gilbert Naccache.

[2Pour un point de vue sur l’opposition en Libye, lire Courant alternatif n°208

 
☰ Accès rapide
Retour en haut