Culture

Lire Marion Cuerq : Une enfance en nORd, pour une éducation sans violence et à hauteur d’enfant




Et si la racine de toutes les dominations était située dans l’enfance ? La façon dont on traite les enfants nous apprend énormément sur la société au sein de laquelle nous évoluons, défend Marion Cuerq dans son ouvrage.
Ce n’est pas un livre militant comme on a l’habitude de s’échanger entre camarades. Et pourtant le propos qui s’y déploie est sacrément subversif : la base de toutes les structures d’oppressions de nos sociétés est à chercher dans les violences prétendument éducatives, affirme Marion Cuerq.

Spécialiste des droits de l’enfant, elle s’est penchée sur cette question très tôt et c’est pour se former qu’elle a décidé d’aller vivre en Suède. Premier pays au monde à avoir légiféré pour interdire toute forme de mauvais traitements sur les enfants, la Suède est aujourd’hui une des démocraties les plus saines du globe, selon l’autrice.

Si ce constat est probablement discutable, le diagnostic posé sur la société française est très juste : maltraiter, physiquement ou psychologiquement une enfant n’est que très rarement sanctionné socialement (judiciairement n’en parlons pas). Pire, les parents qui tentent de pratiquer l’écoute et le respect sont souvent pointés du doigt. Cet état de fait est à la fois constitutif et révélateur d’une société basée sur la méfiance envers l’autre, la verticalité, l’autoritarisme.

Se mettre à hauteur d’enfant-auteur

Cuerq propose deux concepts qu’elle traduit elle-même, issus des sciences de l’éducation suédoises : la hauteur-d’enfant et l’enfant-auteur. Elle note au passage que nombre de mots utilisés en suédois manquent en français, tout comme des termes comme « enfant roi » ou « mettre au coin » sont difficilement traduisibles dans l’autre sens. Ce qui est révélateur d’une imprégnation profonde des mentalités.

La hauteur-d’enfant donc : il s’agit de regarder le monde avec des yeux d’enfant, pour essayer de comprendre ce qu’ils vivent. C’est un devoir qu’ont les adultes qui sont censés prendre soin des enfants qui les entourent. Ne pas attendre de l’enfant qu’il s’adapte, mais essayer de voir comment lui perçoit les choses, afin de créer une relation la plus horizontale possible.
L’enfant-auteur, c’est l’impératif de ne pas perdre de vue que malgré toute la bonne volonté du monde, seul un individu qui a dix ans aujourd’hui sait ce que c’est que d’avoir dix ans aujourd’hui. Il faut donc au maximum écouter les premières concernées et prendre en considération leur avis.

Sur le plan du droit, l’autrice rappelle que la France est signataire de la Convention internationale des droits de l’enfant. Ce texte de 1989, qui est longuement présenté et expliqué dans le livre, place l’enfant au coeur d’un projet de société plus juste et plus démocratique. L’enfance n’est pas une étape vers l’âge adulte mais un moment fondamental de la vie d’un individu. Et les adultes ont donc le devoir de construire une société accueillante et adaptée aux plus petites. Ce faisant, on bâtit une société plus ouverte et plus saine, on s’éloigne du validisme, du racisme, du fascisme (même si Cuerq n’emploie pas ces mots-là).
Une lecture souvent bouleversante.

Mélanie (amie d’AL)

  1. Marion Cuerq, Une enfance en nORd : pour une éducation sans violence et à hauteur d’enfant, Marabout, 2023, 222 pages, 18,90 euros
 
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