Gilets jaunes

Le temps d’une journée, Paris comme rendu au peuple




Blocages, affrontements, convergence... Un récit de la journée d’action du 8 décembre, par les communistes libertaires de la région parisienne, avec un reportage photo.

Le samedi 8 décembre a marqué la quatrième grande journée de mobilisation nationale des gilets jaunes. Les appels au calme doublés des menaces de répression n’y ont rien fait : la mobilisation continue. Des ronds-points, péages, zones commerciales et axes routiers ont été bloqués dans tout le pays, et des manifestations ont lieu dans les villes.

En Île-de-France, plusieurs groupes d’Alternative libertaire ont participé aux rassemblements et manifestations parties de Saint-Lazare, de Bastille ou directement aux Champs-Élysées. Ils y ont distribué le dernier tract d’AL (très bien bien reçu), les autocollants « grève sabotage blocage », « Pas de fric ? Faisons payer les riches » et autres, ainsi que le journal titrant sur le mouvement.

Le cortège parti de Saint-Lazare, avec une très nette coloration syndicaliste, de gauche et d’extrême gauche, a été bloqué pendant une heure dans un périmètre autour des Grands Magasins – une sorte de nasse très très large. Puis l’armada policière a brusquement déguerpi pour se porter sur un autre point de la capitale. Preuve que lorsque la contestation éclate en de multiples endroits, le verrouillage policier est impossible.

Scènes étonnantes dans les beaux quartiers

Dans la rue, on trouvait la diversité caractéristique des mouvements populaires : des gens de droite comme de gauche, venus de tout le pays, de Normandie, de Marseille, de Bretagne, du Nord, mais aussi des banlieues parisiennes. Et, dans cette foule très diverse, des groupes organisés s’efforçant de faire passer leur message : des nervis d’extrême droite, quelques conspirationnistes, mais aussi des groupes antifascistes, d’extrême gauche, de syndicalistes SUD ou CGT, des gens portant l’autocollant « gilet jaune antiraciste » ou « antisexiste » ou « pour le climat ». On fera tout pour réduire à la portion congrue les tendances réactionnaires dans le mouvement.

Malgré les tentatives des autorités de séparer « casseurs » et manifestant.es, la foule est restée cohérente et solidaire dès lors qu’elle était au contact de la police. Le dispositif policier était hors norme, et a considérablement aidé les gilets jaunes à bloquer la moitié de la capitale. Ce fut en effet une scène étonnante que celle de ces beaux quartiers de l’ouest de Paris, totalement désertés par leur population, les rues vidées de leurs voitures et de leurs Velib, les magasins rideau baissé, les vitrines barricadées, les métros fermés…

Dès que l’on s’éloignait un peu des points de confrontation avec la police, autour de la place de l’Étoile, on était frappé par le calme, presque la quiétude qui baignait ces immenses avenues, uniquement perturbées de temps à autre par le passage d’un hélicoptère de surveillance. Çà et là, sur la chaussée libérée des voitures, des groupes de gilets jaunes déambulaient, un sandwich à la main, une pancarte dans l’autre. Le temps d’une journée, Paris comme rendu au peuple... cinquante ans après Mai 68 !

Blocage économique inédit

Mais il n’y a pas là qu’un beau symbole. À deux semaines du réveillon de Noël, les manifestations des gilets jaunes ont réussi – en obligeant la préfecture à ce plan de prévention radicale – à provoquer un blocage économique totalement inédit de ce haut lieu de la surconsommation bourgeoise que sont les Champs-Élysées et les Grands Magasins. Cela devrait pousser les capitalistes à faire pression sur leur chargé d’affaires à l’Élysée pour qu’il cède du terrain, dans l’espoir d’une solution à cette crise.

Afin que Macron cède sur le terrain social, sur l’amélioration du niveau de vie, sur le retour des services publics de proximité – et pas en saupoudrant des mesures démagogiques comme jusqu’à présent, il est crucial que ce mouvement de blocages économiques et de manifestations de rue se double à présent de départs en grève, et que le mouvement social et syndical de lutte devienne un acteur à part entière de cette vaste contestation.

C’est ainsi qu’on pourra renforcer le rapport de force face à l’État et au patronat, et arracher des conquêtes sociales, voire enclencher un processus authentiquement révolutionnaire.

Des militantes et militants AL de région parisienne

Reportage photo de Marcos Vega/AL Paris nord-est

 
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